Jean-Noël CogheRory Gallagher - Rock'n'Road Blues Le Castor Astral2003 ./ 221 pages ISBN : 2-85920-524-1 FORMAT : 16 x 25 cm
Version anglaise disponible:Rory Gallagher, A Biography, Mercier Press, Dublin. Traduction de Lorna Carson et
Brian Steer.
Parue en 2000 et rééditée cette année
par le Castor Astral, cette très intéressante biographie est déjà un ouvrage de
référence et, une fois n’est pas coutume – Cocorico ! -, sa traduction
anglaise cartonne, paraît-il, de l’autre côté du Channel. Il faut dire que l’on
a du mal à s’extraire de la lecture de ces quelque 200 pages riches en
illustrations, consacrées à l’ami Rory. Oui, l’ami, car la chaleur humaine que
dégage la plume de Coghe, intime du musicien, nous donne vite l’impression
agréable de faire partie de la famille, du clan !...
Vous avez dit clan ? Non, Rory Gallagher n’était pas
écossais. Il voit le jour dans la très catholique et irlandaise ville de Cork,
le 2 mars 1948, dans un milieu modeste. Son père est employé dans une centrale
hydroélectrique et sa mère, femme au foyer, élève les deux bambins, Rory et son
cadet Donal qui deviendra l’agent de son frère, son road manager, ange gardien,
etc. Pour Rory, la musique s’impose très tôt comme une autre façon de respirer.
Il a sa première guitare à deux ans et une autre beaucoup plus jouable dès cinq
ans. A neuf ans, il maîtrise déjà l’instrument.
Nous sommes à la fin des fifties et à l’orée des sixties.
Rock n’ Roll droit devant, les premières influences de Rory, outre la musique
celtique traditionnelle, sont les rocks teigneux d’Elvis, de Chuck Berry,
d’Eddy Cochran, etc. Mais avant d’arriver à Memphis, Tennessee, cette musique a
trempé ses plumes dans les eaux boueuses du Mississippi ; Rory Gallagher sera
avant tout et définitivement considéré comme un véritable musicien de blues, un
des rares « blancs becs » à obtenir ce statut, à l’égal des Clapton, S.R.V.,
Peter Green, Hendrix, etc.
Mais la touche Gallagher donne ce surprenant mariage entre
la musique du Delta de Robert Johnson, de Son House, le blues électrique de
Chicago avec Muddy Waters, et ces lancinants accords celtiques qui font tourner
la musique comme tourneraient des derviches (certains voient d’ailleurs les
hauts plateaux d’Anatolie comme une des origines les plus vraisemblables de la
musique celtique). Tourne, tourne, turn again…
Rory commence à se produire dans les bars du coin, seul ou
en groupe. Rapidement, il gagne quatre sous et beaucoup d’estime. Il veut alors
s’offrir "le" rêve guitaristique : la fameuse Fender Stratocaster que
Leo Fender vient tout juste d’inventer et dont Rory ne doute pas du
raz-de-marée dont elle sera la cause. Aujourd’hui encore, cet instrument reste
une référence incontournable avec son manche vissé hyper confortable. Le modèle
1961 que Rory achète le suivra finalement jusqu’à sa mort. Il a 15 ans ; nous
sommes en 1963.
Après avoir joué dans plusieurs groupes dont leFontana Showband, les choses sérieuses commencent pour lui en 1967 quand
il fonde la première mouture deTasteavec deux jeunes de Cork, Norman Damery à la
batterie et Eric Kittringhan à la basse. Cette formule du «power trio» dont il
est l’un des premiers expérimentateurs, sera sa marque de fabrique. C’est au
travers de ce minimalisme qu’il donnera le meilleur de lui-même.
Tastes’impose rapidement comme un groupe de blues
particulièrement efficace. Rory, avec sa Strato, chante aussi, d’une voix
pleine et émouvante, sur scène comme sur le vinyle. Il y a toujours un ou
plusieurs morceaux acoustiques qu’il joue sur une Martin ou sur un Dobro avec
résonateur métallique, ce qui convient à merveille au blues poisseux de Delta,
celui de Son House. Rory maîtrise à la perfection la technique du slide, avec
le bottleneck qui produit des notes longues et plaintives.
Tasteconnaîtra plusieurs moutures avant d’éclater
définitivement dans les seventies et d’être remplacé par leRory Gallagher Band.
Une de ces moutures atteste de la grande ouverture d’esprit de Rory. En effet,
le natif catholique de Cork joue avec deux compères, non seulement protestants
de Belfast, mais en plus militants orangistes! Fallait-il, comme on le constate
à chaque page du livre, que seule la musique comptât pour l’ami Rory, seul
domaine où, par contre, aucune concession n’était possible…
Le succès pointe son nez après les premières années de
vache maigre. Dormant et mangeant tant bien que mal dans le van,Tastese produit au fameux festival de l’île de Wight durant
l’été 1970. Après le premier disque intitulé simplement «Taste», enregistré en
1969 chez Polydor, suivront à un rythme frénétique tournées et enregistrements.
Rory traversera plus de trente fois l’Atlantique pour se produire aux
Etats-Unis. Il jouera aussi plusieurs fois au Japon, en Nouvelle-Zélande et en
Australie, maintes fois aussi en Europe avec pour point d’orgue l’Allemagne et
la Belgique où, dès le départ, le public répond présent. Dans la région de
Lille, Jean-Noël Coghe nous fait découvrir, avec un peu de complaisance
semble-t-il, tous les copains Ch'timi de Rory.
Quelle que soit l’importance des salles et des arènes,
Rory joue toujours avec la même intensité et un respect égal du public. Les
disques se vendent bien : si les chiffres ne sont pas communiqués, on peut
supposer les ventes confortables, en tout cas à partir du milieu de la
décennie. Bien qu’ayant le respect, voire l’amitié du gotha de l’époque, de
John Lennon à Bob Dylan en passant par Clapton et les Rolling Stones, Rory
n’aura jamais le statut de rock star. Tant mieux sans doute… Il faut dire que
son refus de se plier aux modes, sa simplicité naturelle (il est toujours vêtu
d’un jeans et d’une vielle chemise de cowboy, ses cheveux longs peignés comme
au premier jour), l’absence de scandale suivant des parties douteuses à l’ombre
des palmiers honteux de L.A. et, surtout, sa vraie gentillesse et une honnêteté
fondamentale, ne sont pas des ingrédients souvent utilisés dans les recettes
épicées des faiseurs de vedettes. Encore une fois, pour lui, seule la musique
comptait.
Il vivra dans la solitude, sans compagne ni enfant.
D’évidence, il n’était pas un homme à femmes. Il vivra également sans maison,
bien que quelques amis du gotha aient fini par le convaincre d’acheter au début
des années 90 la maison qu’Elton John bradait à Londres, une «affaire» où il
vivra finalement peu. N’aimant pas vivre en Angleterre et souhaitant
s’installer en France, il n’en aura hélas pas le temps, surpris par la mort. A
ce propos, contrairement à l’idée répandue, ce n’est pas l’alcool qui le tuera.
Rory, en bon Irlandais, picole dur mais moins que son frère comme le confesse
celui-ci à qui, d’ailleurs, Rory en fait le reproche. Il souffre en fait d’un
stress inhérent à son statut (plus de 200 concerts par an !) et tombe dépendant
des neurodépresseurs, ces «pilules du bonheur» qu’un médecin trop complaisant
lui procure malgré les mises en garde multiples du corps médical et des
proches.
Rory meurt au King Hospital après une intervention aux
reins réussie, mais après avoir malheureusement attrapé un virus que son
système immunitaire complètement déficient ne parvient pas à chasser. Il rend
sa dernière note le 14 juin 1995. Il est inhumé à Cork après un office
religieux dans l’église catholique de la ville. Malgré la pluie, la foule se
presse autour de l’église. Pour une fois, ironise-t-on, c’est lui qui attend
son public devant l’hôtel où on a placé la fameuse Stratocaster. Une foule
immense suit le corbillard jusqu’au cimetière de Cork, ville qui a dédié le nom
d’une de ses places à l’enfant du pays, le simple, discret et génial Rory
Gallagher…
Alain Roman
NDLR: comme me la
souligner Nico , Rory est bien né à Ballyshannon et non Cork ,et l'opération
n'est pas aux reins mais au foie,en fans de Rory vous aurez surement rectifié
,dans ma hâre de terminer je ne m'étais pas relu,honte sur moi.....comme je
l'ai déja signaler si vous trouver des erreurs ou des omissions de ma part
,n'hésiter pas à me prévenir , j'y regarderais avec attention ........